Le vin naturel en Belgique : existe-t-il une définition légale ?

Explorer, comprendre et déguster le vin naturel belge

Une définition légale absente… pour l’instant

En Belgique, il n’existe aujourd’hui aucune définition légale du vin naturel. Contrairement à des termes régulés comme "vin bio" ou "vin biodynamique", qui impliquent des certifications spécifiques et des contrôles stricts, le "vin naturel" reste un concept sans statut officiel. Ce flou juridique permet aux producteurs et distributeurs d’utiliser librement cette mention sur leurs étiquettes… Mais, pour les vignerons réellement engagés, ce vide réglementaire peut être frustrant.

En France, depuis 2020, une charte officielle a été adoptée par le Syndicat de Défense du Vin Naturel, et elle propose plusieurs critères pour définir le vin naturel : utilisation exclusive de levures indigènes, pas d’ajout de sulfites ou seulement à faible dose, raisins issus de l’agriculture biologique, etc. Mais chez nous ? Rien de tel. La Belgique n’a pas encore suivi cette voie, peut-être faute d’une filière suffisamment structurée ou d’un consensus clair au sein des producteurs.

Vin naturel, vin bio, vin biodynamique : des distinctions utiles

Pour bien comprendre ce qu’implique l’absence de définition légale, il faut revenir aux différences entre vin bio, biodynamique et naturel. Ces termes ne sont pas interchangeables, même si leur philosophie converge.

  • Vin bio : Il suit une réglementation européenne claire. Les raisins doivent être issus de l’agriculture biologique et certains intrants œnologiques sont autorisés, mais en quantité limitée.
  • Vin biodynamique : Il va un cran plus loin. Il respecte les bases de l’agriculture biologique, mais il s’appuie également sur des pratiques spécifiques (calendrier lunaire, préparations à base de plantes, etc.), souvent certifiées par des labels comme Demeter ou Biodyvin.
  • Vin naturel : Ici, pas de cadre réglementaire (du moins en Belgique). En théorie, il prône une vinification sans intrants, ni interventions chimiques, avec une expressivité maximale des raisins et du terroir.

En l’absence de normes légales, le vin naturel repose donc sur une forme d’éthique et de confiance entre le vigneron, le vendeur et le consommateur. Mais cette confiance, fragilisée par l’essor du marketing, peut facilement être mise à mal.

Un flou qui ouvre la porte aux abus

L’absence de cadre légal pose une question majeure : comment être sûr que ce que l’on achète comme étant un vin naturel l’est vraiment ? Si certains vignerons belges travaillent avec sérieux et dans le respect des fondamentaux de ce mouvement (fermentations spontanées, zéro intrant, pas de filtrage forcé), d’autres peuvent être tentés d’associer l’étiquette "vin naturel" à un simple argument commercial.

À titre d’exemple, un producteur pourrait très bien mettre sur le marché un vin faiblement filtré ou avec peu de sulfites ajoutés et l’appeler "naturel", même si ses raisins proviennent de vignes conventionnelles arrosées d’herbicides et de pesticides. Sans cadre juridique, difficile pour le consommateur de démêler l’authentique passion du pur opportunisme.

Le rôle des cavistes et des associations

Chez moi, à Namur, je fais systématiquement en sorte de m’approvisionner auprès de domaines belges et étrangers dont je connais les pratiques. J’explique toujours à mes clients qu’un vin naturel est, avant tout, la somme d’un ensemble d’engagements : bio ou biodynamie à la vigne, zéro intrant en cave, et une transparence totale. Mais est-ce suffisant pour protéger les amateurs ? Probablement pas.

Certaines associations, comme L’Association des Vins Naturels (AVN) ou d’autres collectifs de défense, militent pour qu’une définition claire soit adoptée à l’échelle européenne ou nationale. Mais les démarches avancent lentement, en grande partie à cause des désaccords sur ce que "zéro intrant" devrait signifier.

Et chez nos voisins ? Des pistes pour l’avenir

Pour la Belgique, on pourrait s’inspirer des premières initiatives légales mises en place ailleurs. En plus de la charte française évoquée plus tôt, l’Italie, par exemple, dispose d’associations très actives comme VinNatur, qui offre une certification privée avec des exigences strictes. Ces modèles combinent auto-régulation et transparence, deux aspects essentiels pour défendre l’intégrité du vin naturel sans pour autant étouffer ses artisans sous un poids administratif.

Alors, pourquoi pas chez nous ? Avec la montée des micro-domaines belges et la popularité croissante des vins naturels, il serait peut-être opportun que notre pays se positionne officiellement sur le sujet. Une telle initiative offrirait des garanties aux consommateurs tout en valorisant davantage les vignerons qui respectent des pratiques exigeantes.

Pour conclure : l’essentiel reste la confiance

En attendant une éventuelle régulation, la clé pour naviguer dans l’univers du vin naturel en Belgique est de se méfier des apparences et de s’appuyer sur des interlocuteurs de confiance. Les cavistes passionnés, les salons de vin naturel ou encore les visites chez les vignerons sont autant d’occasions de poser les bonnes questions et de rencontrer les artisans qui donnent à ces bouteilles leur sincérité.

Le vin naturel n’est pas qu’une mode ou un argument marketing, c’est une véritable philosophie. Et si aujourd’hui la Belgique n’a pas encore de définition légale pour le protéger, l’énergie des vignerons belges engagés démontre qu’il s’agit, avant tout, d’un manifeste pour un vin plus vivant, plus vrai. Et ça, ni une loi ni une étiquette ne pourraient l’encadrer pleinement.

Vignoble belge et vin naturel