Le vin naturel : pourquoi le qualifie-t-on de “vivant” ?

Avant d’aller plus loin, posons la base : un vin naturel est produit avec un minimum d’interventions, que ce soit à la vigne ou au chai. Et ici, quand on parle de “vivant”, il faut comprendre que cela dépasse le simple fait que le vin soit un produit issu de la fermentation du raisin. Le vivant du vin naturel, c’est à la fois un état d’esprit et une réalité chimique et biologique bien concrète.

Concrètement, un vin naturel contient des microorganismes, notamment des levures et des bactéries, qui continuent à interagir avec le vin, même une fois mis en bouteille. Ce sont ces levures indigènes, souvent issues du terroir même où poussent les raisins, qui jouent un rôle central dans la fermentation spontanée, un processus au cœur du vin naturel.

Contrairement aux vins conventionnels où des levures sélectionnées (d’origine industrielle) sont souvent ajoutées pour contrôler le processus de fermentation, ici, la magie se produit avec les levures naturellement présentes sur la peau des raisins et dans l’environnement. Ces microorganismes sont vivants et actifs. Et c’est pourquoi un vin naturel peut évoluer de manière surprenante, même après sa mise en bouteille.

Parlons des évolutions. Lorsque vous ouvrez une bouteille de vin naturel, vous ouvrez en fait une bouteille en mouvement. Un vin naturel peut se transformer au fil du temps. Une cuvée goûtée aujourd’hui n’aura parfois plus tout à fait le même profil dans six mois ou un an.

Cette évolution s’explique notamment par l’absence – ou la très faible présence – de soufre ajouté (les fameux sulfites). Le soufre, utilisé comme conservateur dans l’industrie vinicole depuis des siècles, agit comme un stabilisant en “figeant” le vin. Les vignerons naturels, eux, choisissent souvent de l’ajouter en quantités infimes (ou pas du tout !) afin de préserver un maximum de vie dans le vin.

Résultat ? Chaque bouteille devient un organisme unique, vivant et changeant. Suivant les conditions de conservation, la température, ou simplement l’air apporté à l’ouverture, le vin peut exprimer de nouvelles facettes. Il peut pétiller doucement à l’ouverture, développer d’autres arômes au contact de l’oxygène, ou révéler une légère turbidité due à l’absence de filtration. Autrement dit, une vraie expérience, parfois déroutante, mais toujours fascinante.

L’une des grandes promesses du vin naturel, c’est de mettre en lumière le terroir, ce concept à la fois poétique et scientifique qui désigne l’interaction entre la vigne, le sol, le climat et la main du vigneron. Un vin vivant raconte cette histoire complexe et intime, sans artifices.

Dans un vignoble belge, par exemple, les sols argilo-calcaires ou limoneux présentent des caractéristiques bien précises. Un vin naturel élaboré sur un tel terroir pourra offrir des notes minérales marquées, des textures atypiques ou des arômes qui n’existeraient pas si des intrants œnologiques (comme les levures sélectionnées ou les enzymes) étaient utilisés. Ces vins sont bruts, dans le sens noble du terme : ils résonnent comme des instantanés de nature, capturant un coin de campagne belge dans votre verre.

Ce lien direct avec le lieu de production est renforcé par les pratiques biologiques ou biodynamiques employées par une majorité de vignerons naturels. Cela inclut l’absence de pesticides ou d’herbicides, l’utilisation de composts naturels et parfois des pratiques agricoles moins conventionnelles (observer les phases de la lune, favoriser la biodiversité autour des vignes, etc.). Ces choix participent à la vivacité de la vigne et, par extension, du vin.

Les implications du vin vivant ne sont pas qu’une affaire de sol ou de levures : elles se traduisent par une dégustation différente. Quand on goûte un vin naturel, on peut s’attendre à :

• un éventail aromatique souvent plus large et varié : les levures indigènes multiplient les possibilités aromatiques, là où des levures sélectionnées standardisent les profils de goût
• des sensations en bouche plus texturées et parfois surprenantes : les vins naturels sont souvent non filtrés ou légèrement troubles, ce qui peut apporter une dimension tactile intéressante
• une acidité parfois plus marquée : beaucoup de vins vivants ont une fraîcheur naturelle due à leur mode de vinification, en particulier pour ceux sans soufre ajouté
• des notes évolutives, parfois changeantes au contact de l’oxygène : ce qui demande un peu d’ouverture d’esprit et d’adaptabilité de la part du dégustateur

Il est important de préciser que cet univers vivant peut être déstabilisant, surtout pour quelqu’un habitué aux vins conventionnels au profil stable et maîtrisé. Mais c’est cette vitalité même qui fait leur charme. Et si vous cherchez des vins naturels produits en Belgique pour expérimenter cette vivacité, sachez qu’ils captent souvent quelque chose d’autant plus unique, car produits sur des terroirs encore peu standardisés.

Enfin, l’expression “vin vivant” ne concerne pas seulement ce qu’il y a dans la bouteille. Elle renvoie aussi à une filière engagée sur bien des fronts. Les vignerons naturels, qu’ils soient belges ou d’ailleurs, adoptent une démarche respectueuse de l’environnement, du consommateur et surtout… du vin lui-même.

Ce choix de produire des vins vivants va à contre-courant d’une industrie vinicole souvent tournée vers l’efficacité et la rentabilité à tout prix. Il s’agit ici de préserver la vérité du produit, même si cela demande plus de travail, plus de risques et parfois moins de volume à la fin. Ces vignerons suivent le chemin le plus exigeant, mais aussi le plus gratifiant : celui de laisser le vin s’exprimer, sans le maquiller ni le forcer.

Le vin naturel, vivant par essence, est une invitation à reconsidérer ce que l’on attend du vin. C’est une porte ouverte sur une autre vision : celle d’un produit véritablement artisanal, enraciné dans son terroir et attentif à préserver la faune, la flore et la planète. Il incarne la diversité, l’imperfection assumée, mais aussi la beauté du vivant.

Alors, si vous cherchez une expérience vinique où la Nature semble parler dans votre verre, essayez un vin naturel, belge de préférence, et laissez-vous surprendre. Parfois, au-delà des mots, c’est dans la dégustation elle-même que l’on comprend vraiment ce que “vivant” veut dire.